Alexis, le premier internaute français poursuivi au pénal
par les producteurs et les maisons de disques, a été condamnéle 2 février à 3.000 euros d'amende avec sursis (annulée au bout de cinq ans) et à 10.200 euros de dommages et intérêts. Le tribunal correctionnel de Pontoise (Val-d'Oise) l'a reconnu coupable de contrefaçon pour avoir téléchargé et mis àdisposition sur un réseau "peer-to-peer" dix mille fichiers musicaux, entre août 2003 et août 2004.
Les quatre parties civiles, qui se partageront les dommages
et intérêts, sont la Sacem (Société des auteurs,
compositeurs et éditeurs de musique), la SCPP (Société
civile des producteurs phonographiques), la SPPF (Société
civile des producteurs de phonogrammes en France) et la SDRM (Société
pour l'administration des droits de reproduction mécanique).
Les juges ont considéré que «les utilisateurs
des systèmes peer to peer
doivent prendre conscience notamment de la nécessaire protection des
droits des auteurs, compositeurs ou producteurs des œuvres de l'esprit
», rapporte la SPPF dans un communiqué. Un jugement plutôt sévère. Le procureur de la République
avait requis 1.500 euros d'amende. Et les parties civiles avaient réclamé
au total 28.366 euros de dommages et intérêts. Elles ont eu beaucoup
moins. Pour autant, la SPPF se félicite du «caractère
proportionné et exemplaire de ce jugement».
Contactée par ZDNet,
Murielle Cahen, l'avocate d'Alexis, a indiqué que son client n'avait
pas encore pris la décision de faire appel, ou non, de ce jugement.
Déroulement du procès d'Alexis, ou plutôt d'Alain
On a désormais un peu plus de détails sur Alexis, l'enseignant de 28 ans accusé d'avoir téléchargé l'équivalent de 614 albums de musique sous format MP3.
Premièrement, il ne s'appelle pas Alexis, mais Alain. On sait maintenant que le logiciel utilisé pour les téléchargements est Direct Connect, et que le hub sur lequel il se connectait réclamait un partage minimal de 3Go de données. Alain en offrait 30, ce sur quoi l'attaque s'est engouffrée.
"Du Springsteen, vous ètes amateur ? C'est très bien"
Le juge est pourtant un personnage semblant sympathique, ne semblant pas sincrement s'attacher aux détails techniques, et écoutant Alain présenter sa défense : il n'a pas mis à disposition ses MP3. Et là, rien ne va plus.
Car la défense connaît Direct Connect et ses règles plus que strictes concernant le partage obligatoire des fichiers pour espérer pouvoir télécharger. Alain déclare avoir triché : une fois qu'il était connecté au hub, il changeait une lettre dans son pseudo (Altapunk) et rendait ainsi ses fichiers inaccessibles.
Un argument balayé par les parties civiles, car il est impossible, connaissant les règles régissant l'univers de Direct Connect, qu'Alain ait pu télécharger des milliers de MP3 pendant un an sans rien envoyer en retour. Ce double "pillage" constitue sa seule défense, a priori bien faible, d'autant que son avocate a déclaré qu'Alain avait téléchargé dans le cadre de la copie privée, alors que sur son propre site, elle écrit que tout ""internaute qui télécharge et partage des fichiers illégaux est responsable de ses actes. Il pourra être poursuivi pour délit de contrefaon, recel voire délit en bande organisée". Elle n'a pas manqué d'être elle-même attaquée sur ce point là pendant la séance.
Les parties civiles demandent 28 366 € de dommages et intérèts, car "le téléchargement en lui-même, à partir du moment où la source est illicite, est contrefaçon". Ce tarif correspond tout simplement à ce qu'Alain aurait payé sur un site de téléchargement légal : 1€ par morceau. Le procureur quant à lui a déclaré qu'il aurait été plus tolérant si Alain avait reconnu les faits plutôt que de présenter une mauvaise défense.